3/28/2018

Son arme

Cet homme jette son arme, lève les mains en l'air, très logiquement ensuite on l'égorge, après quoi l'Etat organise une cérémonie en son honneur, dit l'Ecolière. Je ne comprends pas. Qu'est ce que tu ne comprends pas, dit l'Avocate? Il a fait ce que l'Etat lui demandait de faire. Il est donc normal qu'on lui rende hommage. On lui demandait de se suicider, dit l'Ecolière? Tous les jours, si tu tends un peu l'oreille, on te dit de jeter ton arme, de lever les mains en l'air, dit l'Avocate. C'est même, aujourd'hui, devenu le discours dominant. Les bras en l'air, jette ton arme, on n'entend plus que ça: dans le Journal, à l'Emission, etc. Autrement dit, effectivement, suicide-toi. Ou des variantes : allez, dégage, ôte-toi de là, couche-toi, tais-toi, soumets-toi, etc. Si tu critiques tant soit peu ce qui précède, te voilà aussitôt mis en examen, invectivé, moqué, traîné dans la boue, etc. Donc oui: cet homme a fait ce qu'on lui demandait de faire. Il a aussi pris la place d'un otage, dit l'Apparatchik. C'est un acte de grande bravoure. Je ne parle pas de ça, dit l'Avocate. Bien sûr, c'est très courageux. Et alors? On pourrait aussi citer Soljénitsyne, dit le Visiteur: "Le christianisme est la foi des forts en esprit. Nous devons avoir le courage de voir le mal sur cette terre et de l'extirper"*. De l'extirper, pas de s'offrir soi-même en holocauste.

Le Premier cercle.