10/28/2014

Offensives

Certains disent que face à des manifestants de plus en plus violents, les policiers n'ont d'autre choix que d'élever le niveau de leur propre violence, dit le Double. Admettons que les manifestants se montrent aujourd'hui de plus en plus violents. Je n'en sais rien. A partir de là, il faut s'interroger sur les raisons. La moindre, assurément, n'est pas la violence policière elle-même: l'an dernier, par exemple, quand la police s'en était prise à des familles avec enfants en les arrosant de gaz toxiques. Un grand nombre de personnes avaient également subi des sévices: coups et blessures volontaires, passages à tabac en règle, etc. Des procédures sont d'ailleurs toujours en cours à ce sujet. Hier, les gaz toxiques, aujourd'hui les grenades offensives*,  demain, peut-être, l'aviation de bombardement: bref, les gens regardent, en tirent ensuite certaines conséquences. On ne saurait leur en faire le reproche. Cela relève de la légitime défense**. Vous rendez-vous compte, dit la Poire: si tout le monde raisonnait comme ça. Les gens ne raisonnent pas, dit l'Ethnologue: ça se fait tout seul. Relisez Clausewitz: "La guerre est un acte de violence et il n'y a pas de limite à la manifestation de cette violence. Chacun fait la loi de l'autre, d'où résulte une action réciproque qui, en tant que concept, doit aller aux extrêmes"***.

* Lors d'une manifestation contre la construction contestée d'un barrage hydraulique, le 25 octobre 2014. Un manifestant a été tué.
** Voir "En élargir le concept", 11 août 2013.
*** De la Guerre, I, 1, § 3.

10/27/2014

Très au-delà

On ne voit, ce qui s'appelle voir, que ce qu'au préalable, il nous est déjà arrivé de penser, dit le Cuisinier:  nihil est in sensu quod non prius fuerit in intellectu. Autrement on ne voit rien. Très peu de gens, à l'heure actuelle, voient réellement ce qui se passe, car très peu de gens, aussi, sont aptes à le penser. Ce qui se passe, il est vrai, est complètement inédit, sans précédent. Aussi loin qu'on remonte dans le temps, il ne s'est jamais rien produit de tel*. On manque donc d'un certain nombre de repères, de points de référence. Le phénomène premier est la guerre, celle des dirigeants contre leurs propres concitoyens: guerre totale et sans merci. Mais cette guerre est sui generis, unique en son genre. Je parle des méthodes utilisées. Les gens sont donc dans le noir, ne voient pas ce qu'il y aurait à voir. Ils sont certes mal à l'aise, se posent des questions, mais ils comprennent mal ce qui leur arrive. Certains parlent de trahison, mais on est très au-delà ici de la trahison. C'est même sans commune mesure. Dépravation conviendrait déjà mieux, il s'applique aux élites déclinantes. Mais le parallèle s'arrête là. Encore une fois, il n'y a pas de précédent. Comment penser ce qui est sans précédent?

* Voir "Surpasse", 19 juillet 2014.

10/15/2014

Pasdarans

Les dirigeants sont très inquiets, dit l'Etudiante. Plusieurs milliers de petits chéris* ont quitté ces derniers temps l'Europe pour rejoindre les rangs de l'EIIL au Moyen-Orient. Sans le savoir, ils s'exposent ainsi à de grands risques. Les dirigeants n'en dorment plus. C'est vrai qu'en Irak et en Syrie, l'environnement n'est pas exactement ce qu'il y a de plus favorable à l'épanouissement personnel de jeunes encore en construction, dit l'Avocate. Il est certainement mieux pour nos enfants d'avoir affaire aux policiers de la BAC qu'aux Peshmergas kurdes, sans même parler des Pasdarans, les gardiens de la Révolution iranienne. Oui, on en rencontre aujourd'hui quelques-uns en Irak. Ils combattent aux côtés des Kurdes. Dis-moi un peu: aimerais-tu tellement tomber entre les mains des Pasdarans? Pauvres petits chéris. En tout état de cause, me semble-t-il, les petits chéris devraient comprendre qu'ils sont plus utiles ici même en Europe qu'en Irak et en Syrie, dit l'Ethnologue. Là-bas, comme vous le savez, il y a déjà beaucoup de monde: l'armée turque, la CIA, etc. Ils ne sont donc pas vraiment indispensables. Ici, en revanche, oui. On a vraiment besoin d'eux: dans les quartiers, le RER, certaines barres d'immeubles, etc. On, je veux dire les dirigeants. Les dirigeants comptent beaucoup sur eux. C'est la même besogne que là-bas, mais à moindres frais.

* Voir "Les petits chéris", 30 avril 2011.



10/03/2014

Rien

Que se passera-t-il le jour où de telles images, réelles ou truquées, seront mises en ligne depuis une banlieue européenne, dit l'Etudiante: depuis une cave d'immeuble, par exemple, à 10 ou 15 kilomètres du Châtelet ? Car c'est la prochaine étape, on est bien d'accord. La même chose que précédemment, dit l'Ethnologue. De nouvelles lois seront votées, très probablement, d'ailleurs, elles sont déjà prêtes. La durée de la garde à vue sera portée à dix ans, renouvelable trois fois, mais pas plus. A chaque fois, bien évidemment, il faudra passer devant un juge. En France, comme tu le sais, la justice est indépendante. En même temps, les médias se mobiliseront pour dire que la guerre c'est la paix, l'esclavage la liberté, l'… un modèle de tolérance, etc. Mais ils le font déjà. Un certain nombre de gens voudront peut-être aussi émigrer, je ne sais pas. Bref, tu me demandes: que se passera-t-il? Je te réponds: rien.